Zach, Simon et Derek faisaient la paire, comme ils aimaient à dire. Plus qu’un trio, ils étaient en symbiose. Leurs pensées étaient à l’unisson, leur projets étaient communs, leur goût du risque de même niveau. Et comme toute leur énergie de fin d’adolescence était vouée à la délinquance, ils avaient souvent rusé pour s’enfuir, s’échapper, se sauver en vitesse. Mais la paire avait toujours réussi à se faire la paire.

Depuis peu, ils avaient délaissé les petits délits. Vols à l’étalage, tags et autres méfaits du même acabit ne leur procuraient plus de frissons. C’est pas hasard, un soir qu’ils s’étaient retrouvés dans le boisé du parc du quartier, qu’ils avaient accosté leur première victime. Ils n’avaient eu aucune difficulté à l’effrayer et à lui dérober le peu d’argent qu’elle avait sur elle.

Mais le sentiment qu’ils avaient ressenti, un mélange de puissance et d’excitation, les avaient transcendés. Ils étaient prêts pour une autre étape.

Qu’est-ce que vous en dites? demanda Zach
Oui, c’est cool! s’exclamèrent ses comparses, presqu' au diapason.
Le sentier qui traverse le centre de ski est fréquenté par certains randonneurs. Mais pas si achalandé. Je crois que ce serait un bon spot pour faire des rencontres isolées et faire la fête. Pas trop de monde, moins de témoins et dans les boisés, on peut surprendre une cible à l’abri des regards, continua Zach..
On achète. On se fait des proies demain? demanda Derek.
Pourquoi attendre quand on peut s’amuser tout de suite? Allez, on dîne et on part pour le sentier ensuite, déclara Simon. La paire acquiesça.

*

Repus, gonflés à bloc pour leur expédition, un début d'adrénaline s'installait en eux. Un mélange de crainte, de plaisir, de bravade, d'inquiétude qui allait faire de leur aventure une expérience sans pareille.

Aucun n'aurait osé démontrer le commencement d'un début de frousse, mais comme leur malfaisance prenant du galon, une certaine anxiété les habitait.

Afin d'afficher leur intrépidité, ils escaladèrent le sentier d'un pas rapide, riant et parlant fort, jusqu'à que Simon perçoive un bruit, un genre de couinement.

Écoutez, j"entends un drôle de son, on dirait un animal qui grogne.
Eh la mauviette, on est pas en forêt avec de méchants ours. Juste une station de ski avec quelques boisés. T'as peur ou quoi? ironisa Zach

À ce moment, un gémissement se fit entendre, plutôt une plainte, un râle que les trois complices distinguèrent très bien.

C'est pas un animal, constata Derek, c'est un humain. Y en a peut-être qui baisent dans le coin!
Allez on suit le son. C'est peut-être notre chance. Si en plus, y ont les culottes baissées, on va se bidonner à les voler!

C'était bien une voix qu'ils entendaient et qui venait de plus bas, hors du sentier. Ils se donnèrent le mot pour faire le moins de raffut possible afin de bénéficier d'un élément de surprise et entreprirent leur descente tout doucement.

Ils entendaient encore des geignements, mais plus faibles même s'ils se rapprochaient de leur but. Mais là, c'était plutôt des lamentations.

Dans un ravin plus loin, ils aperçurent une forme humaine étendue par terre, dont ils n'auraient su dire si c’était un homme, une femme. De plus la voix était rauque et de plus en plus ténue.. Arrivés à proximité de leur découverte, la personne avait les yeux clos et ne gémissait plus. Elle ne portait une seule chaussure de course, l'autre gisant plus loin. On pouvait apercevoir à l'extrémité du pantalon de jogging une cheville bleuie.

Plein d'idées leur passa par la tête.

*

IEL qui avait peine à garder conscience, mais sentait tout près la présence de possibles sauveurs, entendit l'un deux demander:

Eille les gars, qu'est-ce qu'on fait?